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C'est presque fait, et ça sera une grande victoire pour les adversaires de l'accord commercial anti-contrefaçon (ACTA). Lundi, il restait encore 116 signatures de députés européens à recueillir sur la feuille de la déclaration écrite n°12 "sur l’absence d’un processus transparent et la présence d’un contenu potentiellement controversé concernant l’accord commercial anti-contrefaçon". Ce matin, comme nous le racontions, les services du Parlement Européen ont accepté de prolonger le délai de signature jusqu'au 9 septembre, puisque l'objectif était tout prêt d'être atteint. Il restait en effet ce midi moins de 70 signatures à réunir sur les 396 nécessaires pour que le texte devienne une déclaration officielle du Parlement.
Ce soir, il est presque certain que la déclaration sera adoptée. Il ne reste en effet que 16 signatures à réunir, et une semaine complète de séances plénières au Parlement Européen pour y parvenir. 54 signatures ont été collectées sur cette seule journée de jeudi.
Portée par les députés Françoise Castex (S&D, FR), Alexander Alvaro (ALDE, DE), Stavros Lambrinidis (S&D, GR) and Zuzana Roithová (EPP, CZ), la déclaration n°12 dit :
A. considérant les négociations en cours concernant l’accord commercial anti-contrefaçon (ACAC),
B. considérant que le rôle de codécision du Parlement européen en matière commerciale et son accès aux documents de négociation sont garantis par le traité de Lisbonne,
1. considère que l’accord proposé ne doit pas imposer indirectement l’harmonisation de la législation européenne sur le droit d’auteur, les brevets ou les marques et qu'il convient de respecter le principe de subsidiarité;
2. déclare que la Commission devrait immédiatement mettre à la disposition du public tous les documents relatifs aux négociations en cours;
3. estime que l’accord proposé ne doit pas imposer de restrictions à la procédure judiciaire ni affaiblir les droits fondamentaux tels que la liberté d’expression et le droit au respect de la vie privée;
4. souligne qu'une évaluation des risques économiques et d’innovation doit précéder l’introduction de sanctions pénales dans les cas où des mesures civiles sont déjà instaurées;
5. considère que les fournisseurs de services internet ne doivent pas être tenus responsables des données qu'ils transmettent ou hébergent par l’intermédiaire de leurs services dans une mesure qui impliquerait une surveillance préalable ou le filtrage de ces données;
6. signale que toute mesure visant à renforcer les compétences en termes de contrôle transfrontalier et de saisies de marchandises ne peut porter atteinte à l’accès à des médicaments légaux, abordables et sûrs à l’échelle mondiale;
7. charge son Président de transmettre la présente déclaration, accompagnée du nom des signataires, au Conseil et à la Commission, ainsi qu’aux parlements des États membres.
Un média sur Internet ne peut pas avoir des informations sérieuses. C'est par ce raccourci hasardeux que le gouvernement, appuyé par TF1, entend discréditer les attaques dont fait l'objet le ministre du travail Eric Woerth.
C'est une méthode de communication éprouvée. Désormais, dès qu'un ministre ou un parlementaire est mis en difficulté par une révélation ou des soupçons, la stratégie consiste à trouver un angle pour attaquer Internet. Ce fut particulièrement clair dans l'affaire des auvergnats de Brice Hortefeux, où Internet avait été pris pour bouc émissaire de l'Elysée au gouvernement.
Dans le cas de l'affaire Bettencourt, le ministre du travail Eric Woerth avait commencé dès le 27 juin sur RTL et LCI à tenter de détourner l'attention vers Internet, en répondant aux questions de Jean-Michel Aphatie dans le Grand-Jury. Il avait dénoncé "les journaux en manque de vente" en visant le JDD qui avait évoqué l'affaire des lingots volés de Robert Peugeot, puis dénoncé "les tribunaux qui se créent sur Internet" à son encontre.
Le lendemain, lors des premières questions au gouvernement sur ce qui allait devenir "l'affaire Woerth", il persévérait. "Comment pouvez-vous prendre sans aucune distance des informations relayées par un site Internet dans un but commercial, et peut-être même politique ?", avait ainsi demandé le trésorier de l'UMP aux députés de l'opposition. En utilisant le terme "relayées" plutôt que "révélées" ou même "proférées", le ministre déniait déjà au site Mediapart la possibilité d'être un média comme les autres, et le mêlait à un simple bloubiboulga d'échos diffus sur Internet.
Aujourd'hui, le mot d'ordre est repris. La tactique a été relayée dans l'hémicycle par l'actuel ministre du budget François Baroin, qui lorsqu'il était député avait défendu avec vigueur l'absence du juge dans le filtrage du net prévu par la loi Loppsi. M. Baroin a ainsi tenté d'assimiler les révélations issues de Mediapart, qu'il ne nomme pas, aux courants d'extrême droite. "Est-ce que vous vous rendez compte que vous êtes en train de tracer le sillon des extrêmes et de l'extrême droite ? (...) Comment vous pouvez jeter l'anathème sur les uns et sur les autres, sans preuve, en additionnant des tweets, les blogs, des gens qui règlent des comptes, des opposants politiques qui ne partagent même pas vos valeurs... Comment vous pouvez continuer sur ce chemin-là ?", a demandé le ministre pour défendre son collège Eric Woerth.
Incidemment, le même dénigrement de Mediapart a été insufflé sur TF1 par Jean-Pierre Pernaut dans son journal de 13H, comme le relève Arrêt Sur Images :
Et bien sûr, ce nouveau rebondissement explosif a trouvé sa place dans les premières minutes des 13 heures. Mais il est peu de dire que Jean-Pierre Pernaut a traité le sujet à contrecœur, après la météo, les résultats du bac, et les économies prévues dans le budget 2010. Et si l'on en croit le présentateur-vedette de TF1, il ne s'agit là que de "nouvelles rumeurs", "une nouvelle fois lancées par un site internet"…
De quoi remettre à l'ordre du jour l'idée de Renaud Donnedieu de Vabres, qui voulait labelliser les sites Internet de presse parce qu'il "'n'y aura pas d'informations de qualité sur l'Internet sans de vrais signatures, de vrais acteurs dont c'est le métier" ? Sans doute non, car avec sa rédaction de journalistes professionnels dirigée par Edwy Plenel, Mediapart serait sans aucun doute labellisé, ce qui ne ferait que renforcer sa crédibilité alors que tous cherchent à le dénigrer...